Cécile Prieur et Le Nouvel Obs.

Le Nouvel Obs et sa ligne éditoriale

Quels types de sujet traite le Nouvel Obs ? En existe-t-il qui ne sont pas traités ?

Mme Prieur nous explique, le Nouvel Obs traite tous les sujets, “ Il n’y a aucune exclusivité, le journalisme c’est ça”. L’Observateur est un magazine, un newsmag une “tradition un peu française de la presse magazine”. Il doit traiter l’actualité dans toutes ses particularités toutes les semaines ( politique, crise du climat, environnement, questions sociétales, internationales, culturelles ou encore les débats intellectuels).
Si un sujet n’est pas traité, “ce n’est pas parce qu’on s’interdit de les faire”,c’est parce qu’il l’a déjà été ou le sera bientôt, parfois ils n’ont pas envie de traiter telle ou telle question ou en tout cas pas d’une certaine manière. “Le magazine est inscrit dans une culture journalistique qui lui est propre”. Les lecteurs de l’Obs, le lisent car ils savent que certaines questions vont être traitées et de certaines manières.

Rejetez vous l’idée que votre hebdomadaire soit situé au centre gauche?

Aucune idée n’est rejetée, les gens peuvent situer l’Obs comme ils le veulent, le magazine ne se situe pas sur un axe précis. D’après Mme Prieur, qui dirige la rédaction de l’Obs depuis deux ans, le magazine ne se situe pas à un endroit précis sur l’échiquier politique car « on n’a pas cette prétention, cette fermeture de se dire : on est de gauche, on est de droite. ». Le journal a pour ambition d’être lu plus largement que ça, on peut être de droite et lire l’Obs, ou bien de gauche et lire le Point. Ceci étant dit, Le Nouvel Observateur a été créé il y a 60 ans par des intellectuels marqués de gauche, c’était à l’époque un journal inscrit dans une tradition d’idée (la Social Démocratie) qui se traduit aujourd’hui par centre gauche. Cependant, Mme Prieur ne le traduirait pas comme ça, car la manière dont le journal essaye de faire du journalisme, c’est de refléter toutes ces idées dans un spectre plus large que: centre gauche. « L’Obs n’a pas pour vocation d’écrire pour un spectre trop petit de lecteurs ». Mme Prieur définit le journal comme progressiste, c’est-à-dire « être pour le progrès social, être un magazine humaniste, féministe, écologiste, qui prône la paix dans le monde et qui est pour la démocratie », ce qui les inscrit sur le flan gauche de l’échiquier politique. L’Obs est un journal qui lutte ouvertement contre les idées réactionnaires, et s’opposer aux candidats politiques si leurs idées le sont, en décortiquant et expliquant pourquoi ces idées sont mauvaises et délétères pour la démocratie.

Les journalistes de l’Obs font des articles d’information où l’information de l’analyse et l’éditoriale sont séparés. Ils font des enquêtes, expliquent des choses et font à côté des éditoriaux où ils expliquent leur position. C’est ce que les lecteurs attendent, il faut que leurs idées soient représentées “ C’est important, que les idées, dans le débat public, soient portées, incarnées dans des articles, des lignes éditoriales.”. “Un journaliste n’est jamais neutre même s’il tend à l’objectivité.” Chaque journaliste a son histoire, ils travaillent dans un endroit et pas dans un autre. Par exemple, Mme Prieur explique que les journalistes de l’Obs ont choisis d’y travailler et pas de travailler dans le magazine Valeurs Actuelles qui, lui, est situé à l’extrême droite. Les journalistes de Valeurs Actuelles quant à eux ne choisiront sans doute jamais de travailler pour l’Obs. Ce sont des choix légitimes, il faut simplement que ce soit transparent pour le lecteur. “ Nous, on se revendique progressistes”.

Quelles sont les valeurs à la fois morales, politiques et philosophiques présentes dans votre journal, au-delà de ce que vous avez pu citer comme le féminisme, l’écologie ou autre?

Pour Mme Prieur, arriver à enquêter, expliquer et porter ces valeurs est déjà un gros travail, car elles ne sont pas toujours représentées dans la sphère publique: à la télé, la radio ou encore sur les réseaux sociaux, c’est un peu binaire “On voit les mêmes têtes, tout le temps les mêmes gens qui disent les mêmes choses.”. Journaliste c’est mettre en valeur de nouveaux porteurs de projets, de nouveaux intellectuels ou de nouveaux comédiens mais aussi raconter ce qui n’est pas encore “mainstream”, pas encore dans le débat public. “On le fait au fil de ça: Quels sont les nouveaux débats? Quels sont les débats avec lesquels on va pouvoir créer la controverse?”. Mme Prieur prend donc comme
exemple pour illustrer son propos une Une datant de l’année dernière, un débat entre Alice Coffin, une militante féministe et Alain Finkielkraut, un ancien intellectuel de gauche qui se situe maintenant plutôt sur “la droite et un peu plus”. Ils ont débattu ensemble sur l’état des rapports hommes-femmes. Un débat intéressant d’après elle car aucunes idées ne sont bannies même si elles ne sont pas les mêmes que celles de l’Obs. “C’est plus intéressant de mettre en dialogue des gens qui ne sont pas fait pour s’entendre, qui ne sont pas fait pour se parler et de voir ce qui en résulte.”. Le fait de créer un espace où des personnes qui ne sont pas censées se parler et même doivent se combattre peuvent échanger des idées, lui a donné l’impression de vraiment faire son métier de journaliste. C’est une expérience qui a reçu beaucoup de commentaires positifs car voir ces deux personnalités ensemble a suscité beaucoup de curiosité et l’échange était intéressant. Journaliste c’est aussi essayer de contrer l’idée que la société se polarise, “les gens de gauche et d’extrême gauche d’un côté et les gens de droite et d’extrême droite de l’autre.” et que donc comme ce sont des gens qui pensent différemment, ils doivent se détester, ne pas se parler, une société comme la société américaine dans laquelle les gens n’arrivent plus à se parler “Ils se détestent, ils se haïssent et sont même dans des univers de pensées parallèles”. La polarisation est un risque qui guette la France, chacun dans son propre univers de pensée sans jamais en rencontrer d’autres. “Les idées sont là pour être contradictoires mais c’est aussi important d’arriver à les mettre ensemble”. Nous sommes pour le débats les plus apaisé et le plus nuancé possible.

Alba Rouvrais
Lucie Privat Diawara

Photographies: Inès.

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