“La première victime d’une guerre c’est la vérité” tels étaient les mots de Rudyard Kipling, grand écrivain britannique, afin de dénoncer la première guerre mondiale et ses mensonges. Dans un contexte de guerre où les seules personnes à détenir les informations venant du front sont les états majors, comment être sûr que la population obtienne les bonnes informations ? Comment ne pas imaginer que ces dernières ne soient pas détournées à des fins de propagandes ? Tout cela repose entre les mains d’une poignée d’individus assez courageux et dotés d’une soif de vérité sans pareil pour se rendre sur le front avec une caméra dans les mains alors que l’ennemi tient un fusil. Bravant les dangers les reporters de guerre couvre tous les terrains de conflits alors que leurs présence dérange et qu’ils sont souvent prit pour cible.
Mais dans ce métier qui, de part son caractère dangereux, a longtemps été un monopole longuement et précieusement gardé par les hommes revenons sur les femmes qui ont marqué l’histoire du journalisme de guerre et qui ont permis de féminiser ce métier.
Nellie Bly : la pionnière

Elizabeth Jane Cochrane est née en 1864 aux États-Unis. Alors qu’elle se retrouve dans le besoin et donc dans l’obligation de travailler, elle découvre un article sexiste mettant en avant que seuls les hommes devraient exercer un métier. Enragée, elle écrit une lettre au journal pour montrer son mécontentement. Impressionné par sa qualité d’écriture, le rédacteur en chef lui offre un poste de journaliste tout en lui proposant un pseudonyme : Nellie Bly.
Son côté téméraire la pousse à devenir une pionnière du journalisme d’investigation, un de ses premiers reportages est un enquête au sein d’une fabrique de conserve afin de dénoncer les conditions de travail déplorables. Puis elle continua dans le journalisme d’infiltration en intégrant un hôpital psychiatrique pour y dénoncer les conditions de vie ou encore en mettant en avant la corruption au Mexique. Mais un événement majeur viendra bousculer sa vie : la première guerre mondiale. Elle décide de se rendre sur le front russe et devient la première correspondante de guerre américaine. Elle voit et relate alors l’horreur de la guerre de tranchées et les milliers de soldats qu’elle croise affamés et terrifiés par le futur qui les attend. Après la guerre, elle continua à lutter pour la place de la femme dans la société en se battant pour leur droit de vote. Via ses nombreuses aventures, Nellie Bly aura prouvé que les femmes ont les capacités pour exercer ce métier au moins aussi bien que les hommes.
Lee Miller : photographe de la Seconde Guerre mondiale

Lee Miller est née aux Etats-Unis en 1907. D’abord mannequin puis photographe renommé, elle côtoie les grands artistes de son temps, de Picasso à Cocteau. Alors que la Seconde Guerre mondiale commence, elle vit à Londres et continue à fournir des photographies de mode au magazine Vogue. Mais en 1942 elle obtient une accréditation par l’armée américaine afin de transmettre des images du Blitz qui s’abat alors sur l’Angleterre. Elle couvre ensuite le débarquement en Normandie et la progression des troupes alliées puis traverse l’Europe de la France jusqu’à la Roumanie. Dans ce périple, elle découvre l’horreur des camps de concentration et d’extermination avec ceux de Dachau et de Buchenwald. Photographiant des dizaines de cadavres entassés, le magazine Vogue lui accordera sept pages pour démontrer l’horreur du nazisme accompagné de la description “BELIEVE IT”.
Christine Spengler : la femme en noir

Toujours vétue de noir Christine Spengler, photographe et auteure française née 1945, se distingue par le nombre de conflits qu’elle a couvert, on y retrouve entre autres la guerre civile d’Irlande du Nord, la guerre du Vietnam, du Cambodge, d’Afghanistan ou encore d’Irak. Grâce a son statue de femme brune elle a pu, selon elle, effectuer différents reportages bien plus facilement qu’un homme dans les pays musulmans que se soit l’Iran de Khomeini ou l’Afghanistan sous le pouvoir des talibans. En effet, elle n’aurait pas pu se fondre dans la masse si elle était blonde aux yeux bleus et elle pouvait profiter de son voile pour y cacher son appareil photo, car de par son statut de femme les talibans n’avaient pas le droit de la toucher. Elle remporta plusieurs distinctions comme le titre de “Femme de l’année” à Bruxelles en 1998 mais surtout elle est faite Chevalier de la Légion d’honneur en 2009. Elle aura consacré toute sa vie à se battre pour ce qu’elle appelait dans sa jeunesse des “causes justes”.
Clarissa Ward : journaliste mais avant tout humaine

Clarissa ward née en 1980 à Londres, elle commence sa carrière en 2003 sur la très controversée chaîne d’information Fox News après l’immense choc qu’ont été les attentats du World Trade Center. Au fil des ans, elle occupe des postes de plus en plus importants d’abord sur ABC News puis sur CNN où elle devient cheffe des correspondants, le poste le plus important chez les reporters de guerre. Au cours de sa carrière, elle a eu l’occasion de couvrir les plus grands conflits, que se soit l’intervention russe en Géorgie, la guerre civile syrienne où elle a montré les atrocités menés par Bachar el-Assad mais aussi la prise de Kaboul par les talibans. Ses travaux exceptionnels lui ont permis de remporter de nombreuses récompenses comme le Peabody Award en 2011 pour la couverture du soulèvement en Syrie. Elle aussi a mit en avant qu’être une femme lui a permit d’accéder plus facilement à l’information particulièrement au Moyen-Orient en partie car selon elle “Une femme apparait aussi moins menaçante”. Plus récemment elle est revenue sur le devant de la scène alors qu’elle couvrait la guerre en Ukraine, elle a interrompu à plusieurs reprises son reportage en direct sur CNN pour aider des civils ukrainiens qui tentaient, épuisés, de franchir un pont à moitié détruit afin de fuir l’avancée des troupes russes.
Au fil des ans et grâce à une poignée de femmes assez courageuses pour franchir les barrières, la profession de journaliste et de reporters de guerre s’est largement féminisée même si les hommes restent majoritaires et il reste un long chemin pour atteindre la parité au niveau de la rémunération. Cependant, être une femme à ses avantages dans certains pays, elles sont souvent considérées comme moins dangereuses et ont une plus grande facilité pour s’approcher de la population civile. Mais dans un monde où un journaliste est tué tous les 4 jours au-delà de la recherche de parité, n’est ce pas toute la profession de reporter de guerre qui est menacée ?
Sources :
Wikipédia:
https://fr.wikipedia.org/wiki/Lee_Miller#New_York
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nellie_Bly
https://fr.wikipedia.org/wiki/Christine_Spengler
https://fr.wikipedia.org/wiki/Clarissa_Ward
TV5 Monde
CNN:
https://edition.cnn.com/videos/world/2022/03/05/ukraine-evacuees-clarissa-ward-kyiv-vpx.cnn
Unesco:
Radio France
Armand Branchet