La France : les origines de l’inquiétude:
La France. Probablement un des seuls pays ou des millions de citoyens ont été dans la rue pour protester contre la politique de notre président, juste avant de le réélire pour 5 ans de plus. Un pays plongé dans une crise sociale, une crise démocratique, une crise économique avec une inflation galopante mais surtout une crise de confiance. Pour comprendre comment nous en sommes arrivés là nous devons chercher les causes de ce désastre :
Disparu dans la mondialisation :
En 1950, la France est le 11ème pays le plus peuplé de la planète, en 2023 l’hexagone se retrouve à la 23ème place. En 1950, la France représente 4,1% du PIB mondial bien que durement touchée par la seconde guerre mondiale. Aujourd’hui elle représente moins de 3%. De plus, après la guerre, la France fait partie du solide bloc de l’OTAN qui doit lutter contre un ennemi commun ce qui galvanise les esprits. L’oncle Sam qui représente alors un quart du PIB mondial semble être la meilleure des protections. Aujourd’hui, la France multiplie les crises diplomatiques avec ses alliés de longue date, en témoigne l’affaire des sous-marins australiens, et ne sait comment placer sa diplomatie étrangère entre les atlantistes et ceux favorables à la théorie de la troisième voie. De plus, notre pays n’a plus un ennemi clairement désigné comme l’était le bloc de l’Est durant la guerre froide. Aujourd’hui, notre planète semble retourner à un monde multipolaire où, malgré l’affrontement sino-américain, de nombreuses puissances ou organisations émergent : L’Inde, les BRICS qui tendent à s’agrandir alors qu’ils représentent déjà une plus grande part du PIB mondial que le G7, l’OPEP, l’Union africaine, le Brésil, la Turquie d’Erdogan en route pour sa réélection ou encore l’Iran. Le retour à un monde multipolaire demande une politique étrangère bien plus organisée et développée si on ne veut pas tomber dans la soumission à une puissance étrangère.
En résumé, la France n’était pas prête à se faire reléguer à la place de puissance de moyenne impuissance.
Des politiciens aveugles :
Depuis des décennies les politiciens n’ont jamais réussi à voir l’avenir de leur pays sur le long terme. La désindustrialisation de la France en est sûrement l’exemple le plus important. Comment nos politiciens ont-ils pu imaginer que notre pays resterait une puissance majeure et aurait de la résilience face aux crises dans une économie entièrement basée sur le secteur tertiaire ? N’ont-ils jamais imaginé qu’un jour, peut-être en cas de crise économique ou de pandémie, seuls les biens industriels de première nécessité seraient recherchés ? Comment ont-ils pu imaginer qu’en ne produisant plus rien sur notre sol, particulièrement dans les secteurs stratégiques comme le secteur de l’armement ou le secteur pharmaceutique, les pays qui nous exportent ces biens nécessaires n’en profiteraient pas pour nous faire du chantage, nous dominer ? Comment en sommes nous arrivés à devoir mettre en place des plans de relocalisation de la production de paracétamol ? Comment ne nous sommes nous rendu compte seulement après l’invasion russe en Ukraine que s’approvisionner en énergie chez un pays hostile était une mauvaise idée ? Comment nous
avons pu négliger l’énergie, cet élément si important qu’il est “le sang de notre économie” comme le dit si bien Yves Bréchet interviewé chez Thinkerview. En effet, aujourd’hui le secteur tertiaire représente 80% des emplois contre seulement 18% pour le secteur secondaire et 2% pour le secteur primaire. Au contraire, en 1950 les emplois étaient bien mieux répartis : 37% dans le secteur tertiaire, 35% dans le secteur secondaire et 28% dans le secteur primaire. De plus, en 1960 l’industrie et la fabrication représentait plus de la moitié de notre PIB contre un quart aujourd’hui. Au-delà d’un secteur économique c’est notre indépendance et notre place dans la géopolitique mondiale que nous avons perdu. Bien sûr certaines industries de pointe sont toujours présentes sur notre sol, comment ne pas citer Airbus ou encore Dassault. Cependant, nous perdons aussi de nos fleurons comme Alstom cédé, avec l’aval d’Emmanuel Macron alors ministre de l’économie, à General Electric. Nous avons tellement perdu de notre industrie que notre président doit se baser sur des investissements d’entreprises étrangères en France. Même si cela semble fonctionner avec en deux ans la création de 200 nouvelles usines sur le territoire national et un chômage au plus bas depuis 1982, si cela pouvait profiter aux entreprises françaises cela serait encore plus avantageux.
Nos infrastructures en question:
Un autre sujet majeur, étroitement lié au secteur industriel, met en avant l’inefficacité de décennies de politique française. L’état de nos infrastructures électriques, alors qu’en 2017 la production d’électricité nucléaire tournait autour de 450 TWh, la production est tombée à 300 TWh en 2022 en pleine crise énergétique dûe à la guerre en Ukraine. En cause, la moitié des réacteurs du parc nucléaire était à l’arrêt au paroxysme de la crise pour une raison très simple : mandat après mandat, les présidents ont mis sous le tapis la question de la filière du nucléaire, la détruisant à petit feu. Voilà là la situation actuelle où nous manquons d’un savoir faire que nous avions développé des décennies auparavant. Déjà 11 ans de retard pour l’EPR de Flamanville et des milliards d’euros de surcoût. Nous avons aussi détruit nos projets d’avenir dans la filière nucléaire pour des raisons de surcoût ou pour développer des énergies renouvelables que nous n’avons au final jamais mises en place. Nous avons perdu Superphénix à la fin du siècle dernier, alors un réacteur à neutrons rapide permettant de réutiliser le combustible nucléaire. Et le projet ASTRID qui permettait de “fermer le cycle” et donc de diminuer fortement la quantité de déchets nucléaires a lui été abandonné pour des contraintes budgétaires en 2019. Pour répondre à la question comment en sommes nous arrivés là : une seule réponse possible, nous n’avons plus de vision à long terme. Nos présidents ne voient le monde qu’en coup de communications.
Malheureusement nos politiciens ont aussi multiplié les fausses routes sur le plan international.
Plus généralement, l’Occident a multiplié les erreurs stratégiques en intervenant dans de nombreux conflits et en étant guidé bien plus par les intérêts à court ou moyen termes que par ceux à long terme ou l’objectif de stabiliser durablement certaines régions du monde. Ces interventions se sont matérialisées de deux manières différentes, la première est la mise en place d’OPEX (opérations extérieures). La deuxième manière à été la mise en place de sanctions économiques à l’encontre de pays ennemis. Même si dans certains cas ces interventions peuvent être justifiées elles montrent surtout que l’Occident a en partie gardé sa vision colonialiste selon laquelle il faudrait “exporter la civilisation” qui s’est transformé en l’exportation de la démocratie. L’exemple parfait de “l’exportation de démocratie” est la deuxième guerre du Golfe. Où les Etats-Unis ont pensé juste d’envahir l’Irak prétextant la présence d’armes de destructions massives. Heureusement, la France a eu le courage de refuser d’intervenir dans cette invasion. Cependant, ce n’est pas le cas pour l’intervention en Libye contre le régime de Kadhafi. Cette intervention qui devait initialement se limiter à l’instauration d’une No Fly Zone par la coalition internationale s’est transformée en l’attaque des colonnes de blindés de l’armée libyenne pour faire tomber le régime. Certes l’idée de faire tomber un régime dictatoriale est bon mais malheureusement, le pays a ensuite été empêtré dans la guerre civile en plus de présence djihadistes et d’esclavage de migrants. De plus, cette intervention a déplacé les armes de Kadhafi vers le Mali où l’armée française vient aussi d’essuyer une lourde défaite.
Malgré tous ses constats alarmants, il y a bien une chose que la France n’a pas perdu : les Français. Relever notre pays est donc toujours possible, mais les défis qui s’annoncent devant nous sont énormes.
Armand Branchet
Sources :
https://fr.statista.com/statistiques/1047192/distribution-de-produit-brut-pib-dans-secteurs-economiques-en-france/
https://www.schoolmouv.fr/cours/l-evolution-de-la-structure-sociale-en-france-depuis-la-seconde-moitie-du-xxe-siecle/fiche-de-revision
https://www.vie-publique.fr/fiches/269995-les-grands-secteurs-de-production-primaire-secondaire-et-tertiaire#:~:text=En%202020%2C%20la%20France%20compte,secteur%20primaire%202%2C1%25.
https://www.lefigaro.fr/societes/pourquoi-la-vente-controversee-d-alstom-a-general-electric-fait-a-nouveau-parler-d-elle-20190724
https://www.bfmtv.com/economie/economie-social/france/en-direct-choose-france-macron-recoit-plus-de-200-patrons-etrangers-a-versailles-dont-musk_LN-202305150259.html
https://www.leparisien.fr/economie/la-france-va-relocaliser-la-production-de-paracetamol-en-2023-30-06-2021-SQRUIG2B4JCFTGS75TASBIYMSA.php
https://fr.wikipedia.org/wiki/Industrie_nucl%C3%A9aire_en_France#/media/Fichier:Production_Electricite_France_1980-2017.svg
https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/energie/electricite-edf-vise-toujours-entre-300-et-330-twh-de-production-nucleaire-en-france-en-2023_AV-202212200423.html
https://www.rte-france.com/eco2mix/synthese-des-donnees?type=production
https://www.sudouest.fr/environnement/nucleaire/electricite-21-reacteurs-nucleaires-sur-56-en-activite-sont-a-l-arret-en-france-13512899.php#:~:text=De%20nouveau%2C%2021%20r%C3%A9acteurs%20nucl%C3%A9aires,arr%C3%AAt%2C%20le%2020%20d%C3%A9cembre%20dernier.
https://www.huffingtonpost.fr/environnement/article/de-nouveaux-reacteurs-nucleaires-construits-plus-vite-le-senat-vote-en-premiere-lecture-une-loi-en-ce-sens_213189.html#:~:text=Il%20s’agit%20de%20l,ou%20%C3%A0%20Tricastin%20(Dr%C3%B4me).
https://fr.wikipedia.org/wiki/Superph%C3%A9nix
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ph%C3%A9nix_(r%C3%A9acteur)
https://www.publicsenat.fr/actualites/non-classe/nucleaire-apres-l-abandon-du-projet-astrid-des-parlementaires-s-alarment-de-l#:~:text=A%20la%20suite%20de%20contraintes,%C2%AB%20la%20fin%20du%20si%C3%A8cle%20%C2%BB