
Yorktown, 1781, le comte de Rochambeau, envoyé par le roi de France, se bat avec ses troupes pour épauler les colons américains dans leur quête d’indépendance. Ces 21 jours de combat signèrent le début d’une relation bilatérale des plus particulière.
Bien sûr, l’aide française pour l’indépendance des Etats-Unis fut un épisode majeur, tout comme l’arrivée des quelques 2 millions de soldats américains pour libérer le nord de la France en 1917. Mais le véritable tournant de ces relations s’est déroulé en 1944 lorsque par milliers les soldats américains débarquèrent sur les plages de Normandie. Le monde était alors coupé en deux et la France avait logiquement choisi le camp de l’Oncle Sam. Mais un homme a radicalement changé cette relation et inspire encore aujourd’hui les discours de politiciens français. C’est à partir de 1958 que tout change, lorsque le général de Gaulle redevient président du conseil des ministres. Fort de sa popularité alors à ce moment-là quasiment inébranlable, il modifie radicalement l’hexagone avec un objectif en tête “l’indépendance nationale”. Alors pendant plus de dix ans le général multiplia les projets innovants qui ont permis de replacer la France parmi les puissances majeures, mais surtout d’en faire une puissance différente. Les deux éléments les plus marquants de cette politique sont probablement la mise en place de la dissuasion nucléaire française mais aussi la sortie du pays de commandement intégrée de l’OTAN. En effet, De Gaulle ne voulait pas voir son pays être totalement dépendant des Etats-Unis, lui qui était en froid avec Roosevelt pendant la guerre et qui voyait déjà la nécessité de construire une Europe “de l’Atlantique à l’Oural”, décide alors de garder un dialogue ouvert avec Moscou et de reconnaître la Chine communiste. La France pouvait alors servir de passerelle entre les deux camps et avait son “indépendance stratégique”.
Que s’est-il passé ?
Depuis des décennies, le rôle de la France dans le monde change, devenant petit à petit une “puissance de moyenne impuissance”, avec aujourd’hui un déficit commerciale qui continue de se creuser, une industrie nucléaire obsolète, une perte d’influence dans le monde, des services publics au bords du gouffre et une fracture sociale béante.
Novembre 2022, cela faisait donc 13 ans que la France sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy était de nouveau entrée dans le commandement intégré de l’OTAN. Emmanuel Macron réalise alors sa seconde visite d’Etat dans le pays de l’Oncle Sam. Les deux présidents ont alors à cœur de s’afficher ensemble tout sourire. Le vol du contrat de 35 milliards d’euros destiné à Naval Group qui n’a, par ailleurs, occasionné aucune représaille française, semble alors déjà bien loin. Macron essayait alors d’obtenir des compromis autour de l’Inflation Reduction Act, ce plan jugé protectionniste comporte une enveloppe de 400 milliards de dollars dont une partie servira à subventionner les entreprises qui participent à la transition énergétique, cependant elles ne concernent que les entreprises américaines, ce qui désavantage par la même occasion celles du Vieux Continent qui risque donc de voir son nombre de délocalisation radicalement augmenter. Les espérances étaient déjà faibles avant ce sommet mais la déception à tout de même fait son effet, après la conférence de presse commune, le président français semble n’avoir rien obtenu outre quelques promesses abstraites. Alors pour lutter contre ce protectionnisme américain une seule voie reste ouverte, mettre en place un “Inflation Reduction Act” européen rapidement en surmontant la lenteur de l’administration.
Mais pour l’Union Européenne le réveil semble difficile, pourtant l’alarme n’a pas cessé de sonner, l’intervention russe en Georgie en 2008, l’annexion illégale de la Crimée en 2014, le déploiement de milices russes en Afrique. Il a fallu l’invasion de l’Ukraine pour qu’enfin les dirigeants européens réussissent à émerger. Cette invasion a l’avantage d’avoir mis en avant la nécessité d’indépendance de l’Europe vis-à-vis de la Russie, particulièrement dans le secteur de l’énergie. Mais elle a aussi renforcé notre dépendance aux Etats-Unis qui ont le plaisir de nous livrer du gaz naturel liquéfié à des prix exorbitants, et à multiplier les ventes de matériel militaire aux Etats européens. Alors pour remettre l’Union sur les rails d’une “indépendance stratégique” qui de mieux que la France, la seule de nation de l’UE dotée de l’armement nucléaire, d’un complexe militaro-industriel complet mais surtout d’une histoire si particulière.
Sources:
Le monde:
Wikipédia:
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_de_Gaulle
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_d%27ind%C3%A9pendance_des_%C3%89tats-Unis
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Yorktown
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Baptiste-Donatien_de_Vimeur_de_Rochambeau
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tats-Unis_dans_la_Premi%C3%A8re_Guerre_mondiale
https://fr.wikipedia.org/wiki/Crise_des_sous-marins_australiens
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_russo-g%C3%A9orgienne_de_2008
Paris Match:
Les Echos:
Ouest France:
Armand Branchet