À une époque lointaine, quand on pouvait encore aller au cinéma (c’est-à-dire il y a une dizaine de jours), est sorti le film La bonne épouse. Cette comédie retrace la vie d’une école ménagère pour adolescentes à la fin des années 60 et les doutes de sa directrice, jouée par Juliette Binoche sur sa propre existence et sur celle de l’établissement qu’elle dirige.

Dans la vraie vie, les premières écoles ménagères de niveau primaire ont été créées à la fin du XIXe siècle pour l’éducation des filles. Ces écoles se sont ensuite développées et tous les niveaux d’enseignement, du primaire au supérieur, ont été concernés à partir des années 1920. Pour la formation des agricultrices, des écoles particulières ont vu le jour. En 1923, une école ménagère d’enseignement supérieur agricole, l’école nationale d’agriculture pour jeunes filles de Coëtlogon, est créée à Rennes.
Elle recrute ses élèves sur concours, après le bac, dans toute la France. L’école à pour mission la formation d’enseignantes en arts ménagers et agricoles de niveaux primaire et secondaire. Dans les années 1950, l’école de Coëtlogon est si réputée qu’une bande de jeunes femmes s’y retrouve et se surnomment le clan des P : la Pomme venue du Morbihan, la Poire venue du val de Loire (en plus ça rime…) et la Prune venue de la région Agen. L’enseignement qu’elles reçoivent permet la diffusion de principes d’hygiène (peut-être un peu oubliés ces derniers temps…), et de nutrition qui s’avère essentielles pour la santé de générations d’enfants et pour l’amélioration de la santé de la population. De plus, l’enseignement ménager se transforme en enseignement de la comptabilité, de la gestion et des sciences économiques à la fin des années 60. Les enseignantes bénéficient ainsi d’une évolution de carrière d’autant plus intéressante, que, sans leur formation, elles seraient sans doute restées femmes au foyer ou épouses d’agriculteurs.
Ironie de l’histoire : l’une des élèves de Coëtlogon connaît un destin exceptionnel en tant qu’ « épouse de ». Colette Hubert, née en 1925, se marie en 1957 avec Léopold Sédar Senghor (1906-2001), président de la République du Sénégal, poète et membre de l’Académie française. Elle est malheureusement décédée le 20 Novembre 2019.
Sources : L’enseignement agricole, 150 ans d’histoire par T. Charmasson, M. Duvigneau, A-M. Lelorrain et H. Le Naou, Dijon, Educagri éditions, 1999, pages 82-83.
Témoignage oral d’une ancienne élève de Coëtlogon.
Photo : Un manuel de cuisine, collection particulière,
cliché : Jade Souleyreau
Jade Souleyreau