La force du Front National réside dans son union d’idées : sous Jean-Marie Le Pen aucune divergence n’était permise. Le chef ultime était le père Le Pen ; une moindre opposition provoquait une exclusion. Jamais il n’était possible de s’opposer, de proposer une ligne différente du parti. Aujourd’hui, depuis que Marine Le Pen dirige le front, deux lignes se sont créées. Dans le processus de dédiabolisation du parti deux lignes se sont formées, l’une incarnée par Florian Philipot, l’autre représentée par Marion-Maréchal Le Pen.
Philippot, le nouveau FN
Le nouveau numéro 2 du parti incarne un nouveau FN. Le parti sous Jean-Marie Le Pen proposait une ligne politique basée sur le libéralisme économique, le conservatisme sociétal et la radicalité sur l’immigration. L’ancien poujadiste se définissait comme un véritable homme de droite radicale. Philippot représente cette nouvelle image du parti ; le nouvel homme fort du front se revendique gaulliste et propose le maintien des 35 heures, l’augmentation du SMIC et la sortie de l’UE, et bien évidemment le retour au franc. Il incarne une politique sociale qui serait proche d’une extrême gauche. Beaucoup de responsables politiques taisent cette vérité mais elle est pourtant présente. C’est un homme qui est sur l’échiquier politique à droite, une droite souverainiste, gaulliste radicale en effaçant toutes les traces des vieux fantômes du passé sulfureux du front. Il est l’acteur principal de la gauchisation du FN, de sa dédiabolisation. Le Mazarin de Marine déploie ses forces pour les présidentielles à venir. C’est aussi celui qui séduit et qui entraîne avec lui ce qu’on appelle le quatrième pouvoir.
La bête médiatique
C’est l’homme des médias, il multiplie les matinales, fait la pub du FN, et met dans sa poche les grands médias. Il rythme la vie médiatique à coup de clash et de buzz ; il détruit ses adversaires ; les débats sont sa force et les interviews qu’il mène à la baguette sont des sabres contre l’UMPS. Dans toutes ses interventions médiatiques il se définie dans ses paroles comme un antisystème, l’homme du peuple contre les élites médiatiques. Or il symbolise à la perfection ce système politico-médiatique. Pendant que la reine du front parcourt les villes, le cardinal gaulliste séduit les journalistes. Il est dans une perpétuelle drague qui forme la nouvelle campagne de Marine Le Pen. Mais Florian Philippot, en imposant sa parole et son style, écarte des membres importants du parti et notamment la petite fille de Jean-Marie Le Pen, Marion Maréchal Le Pen.
Marion Le Pen ou l’incarnation d’une droite traditionaliste
Ses cheveux blonds, son regard charmeur, son sourire ravageur et son discours feraient tomber de nombreuses têtes. Mais sous ses airs de jeune bourgeoise ravissante, se cache une radicalité politique. Elle est l’incarnation même de la droite traditionaliste : elle est contre le mariage pour tous, contre l’avortement et se montre comme une catholique assumée. Elle se définit facilement comme libérale et réaffirme les valeurs catholiques de la France. De quoi faire rougir Fillon. Cette idéologie traditionnelle à la droite se distingue de la ligne officielle du parti. Car à l’inverse de Marine Le Pen et de Florian Philippot qui prônent une laïcité classique, elle revendique le catholicisme européen. Elle montre sans difficulté sa foi catholique. Sa jeunesse séduit l’électorat jeune ; dans une France lassée de ces politiques éternels, Marion Maréchal incarne un renouveau politique. Cette foi profonde vient de son enfance : élevée dans une école catholique traditionnelle elle ne s’est pas détachée de son éducation religieuse. Et les paroles qu’elle prononce à la télévision sont le fruit d’une certaine éducation.
Le Front national en péril ?
Bien qu’elle soit donnée par tous les sondages au premier tour de la présidentielle, Marine Le Pen pourrait être affaibli ou renforcer.
Deux cas de figures peuvent s’illustrer : l’un, celui de la division au sein du mouvement frontiste, une campagne qui s’ouvre pour Marion Maréchal Le Pen et l’ultime chance de Marine Le Pen d’atteindre l’Elysée est foutue. Une possibilité s’offre à la présidente du parti : la stratégie du râteau. Elle a dans ses mains deux armes, deux électorats. Un électorat de la droite gaulliste de la droite sociale, et un électorat de la droite traditionnelle, la droite libérale, bourgeoise, la droite de la manif pour tous. Une merveilleuse attaque électorale, on ratisse large. Alors le face à face Philippot-Maréchal fera t-il perdre ou gagner le FN ?
Corentin Masson