3 ans de guerre, 150 000 morts, 2 millions et demi de réfugiés et pas la moindre solution en vue. L’ampleur de la crise syrienne a dépassé tous les pronostics et le conflit est loin d’être terminé.
Mais comment expliquer une telle situation ? Comment le soulèvement pacifique du printemps 2011 s’est-il transformé en un bain de sang généralisé ? Pour comprendre, il faut passer en revue les différentes facettes de la crise…
Le conflit en Syrie : une guerre civile.
D’un côté les rebelles principalement des sunnites la communauté majoritaire en Syrie, ils occupent le nord, la banlieue de Damas et des zones rurales au sud et au centre du pays (Le sunnisme est un courant religieux majoritaire de l’Islam car 85 % des musulmans sont sunnites. Il est parfois apparenté à une vision orthodoxe de l’islam).
En face, les loyalistes qui s’appuient sur la communauté alaouite, une secte qui provient du chiisme, dont le clan de Bachar el-Assad est issu. Elle est une des trois principales branches de l’islam avec le sunnisme et le kharidjisme ( Le chiisme regroupe environ 10 à 15 % des musulmans, dont 90 % de la population iranienne). Les loyalistes tiennent la capitale et la plaine côtière, une zone de peuple majoritairement alaouite. Les forces pro-régimes se sont récemment emparées du Qalamounqui, une montagne en lisière du Liban. Les insurgés ont alors répliqué en pénétrant au nord de Lattaquié (ville du nord-ouest de la Syrie), ailleurs le front est stable.
Mais, très vite cette guerre civile est récupérée par de très nombreux pays qui ont fait de la Syrie un véritable champ de bataille. Premiers acteurs de cette forme de mondialisation, les puissances occidentales soutiennent l’opposition. Les Etats-Unis et les grands pays Européens accompagnent la Coalition Nationale Syrienne (CNS), la principale formation anti-Assad. Lancée fin 2012, la CNS est reconnue par une centaine de pays comme étant l’unique représentant du peuple syrien. Mais le soutien occidental, principalement diplomatique, ne lui a jamais permis de s’ériger comme une réelle et fiable alternative au régime Assad. Les financements restent insuffisants, les livraisons d’armes se font très rares ainsi que restreintes. Les Etats-Unis ont toujours refusé l’option militaire notamment après l’attaque chimique contre la banlieue de Damas en août 2013.
Deuxième vecteur d’ingérence la Chine et la Russie protecteurs du régime Assad
Ces deux membres du conseil de sécurité de l’ONU ont bloqué à trois reprises des projets de résolution hostile à Damas, Moscou ravitaillant notamment l’armée syrienne. Dans cette crise économique et politique sans précédents, les motivations de la Russie sont de diverses natures. Économique d’abord, car le régime actuel est un vieux client de son industrie de défense militaire, ensuite avec le port de Tartous qui constitue sa toute dernière base en Méditerranée, mais aussi et surtout géopolitique car le Kremlin a très mal vécu l’intervention de l’OTAN en Libye en 2011. Celle-ci avait pour but de se limiter à la protection des civils, mais qui a finalement abouti au renversement de Khadafi. Hors de question pour le président russe de laisser ce scénario se répéter, surtout dans une des zones d’influence comme la Syrie. C’est ainsi que le soulèvement anti-Assad est devenu la proie d’affrontement entre l’Est et l’Ouest de la planète.
Troisième intervenant : Les pays arabes dans le conflit syrien.
Les monarchies sunnites du golfe et, notamment, l’Arabie Saoudite ont vu dans la révolte syrienne l’occasion d’affaiblir leurs ennemis. Notamment Riyad qui compte affaiblir son adversaire numéro 1, l’Iran, le géant chiite dont le régime Assad est le principal allié au Proche-Orient. L’Arabie Saoudite, mais aussi le Qatar ont multiplié les livraisons d’armes aux armées rebelles en passant par la Jordanie ainsi que la Turquie. Parallèlement de nombreuses donations privées ont afflué grâce à l’activisme de Cheikh Salafistes basé au Koweït. Avec le temps, les financiers du golfe en sont venus à soutenir des formations de plus en plus extrémistes, plus au nord le gouvernement turc très opposé à Damas a joué avec le feu en laissant passer sur son territoire des recrues de l’Etat Islamique en Irak et au Levant. En face, le régime Assad bénéficie du soutien de ses alliés chiites.
Quatrième et dernier secteur de l’instrumentalisation de la crise syrienne.
L’Iran fournit à Damas de l’argent des armes et des conseillers militaires. Il y a aussi le Hezbollah, la milice chiite libanaise. Au début du conflit ces combattants se contentaient de patrouiller le long de la frontière avec la Syrie. Mais peu à peu ils ont été associés aux offensives des troupes gouvernementales. De même pour les milices chiites Irakiennes, d’abord affectés à la défense du mausolée chiite de SayyedaZaïnab, elles sont désormais déployées dans tout le pays notamment à Alep.
C’est ainsi que la Syrie est devenue le théâtre d’un nouvel épisode de la rivalité ancestrale entre chiites et sunnites.
Finalement, guerre civile, guerre froide, guerre sainte, le conflit syrien est un concentré de problématiques locales, régionales et internationales.
Un casse-tête qui semble pour l’instant impossible à résoudre.
La Classe Média
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